Mortician - Mortal Massacre

Mortician - Mortal Massacre - 3/6 - par Stryg
Mortician - Mortal Massacre
Groupe : Mortician
Album : Mortal Massacre
Genre : Death/Grind
Année : 1993
Label : Relapse Records
Pays : USA
Durée : 59:30
Remarques :
Note : 3/6
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Tracklist :

1 - Intro / Mortal Massacre
2 - Drilling For Brains
3 - Redrum / Outro
4 - Intro / Mortician
5 - Brutally Mutilated
6 - Necrocannibal / Outro
7 - Mortal Massacre (live)
8 - Brutally Mutilated (live)
9 - Necrocannibal (live)
10 - Drilling For Brains (live)
11 - Hacked Up For The Barbecue
12 - Redrum (live)
13 - Bloodcraving (live)
14 - Cremated (live)
15 - Mortician (live)
16 - Brutally Mutilated (live)
17 - Drilling For Brains (live)
18 - Bloodcarving (live)
19 - Scum (Napalm Death Cover - live)
20 - Mortician (live)


ATTENTION ! CHRONIQUE INTERDITE AUX VEGETARIENS !

S'il y a bien deux noms qui reviennent lorsque l'on additionne le terme très doux du « metal extrême » et le champ lexical très lyrique du gore et des zombies pas frais, c'est bien Cannibal Corpse et Mortician. Chose amusante à constater, c'est l'évidence même qu'ont ces deux légendes de la mort à aussi bien se compléter qu'à se différencier, et que le parallèle entre musique et thématique est tout aussi intéressant à disséquer : Là ou les bouchers de Floride, à défaut d'une technique toute morbid angelesque, priment l'efficacité, le savoir-faire et le son Morrisound Studios sur le feeling, à grands renforts de textes très hardgore, les new-yorkais de Mortician délaissent ce côté de leur musique pour faire un grand point d'honneur sur les ambiances. En gros, et ça parlera plus aux cinéphiles de bon goût, c'est comme si on comparaît les pitreries ultra gores d'Andréas Bethmann, Timo Rose ou encore Olaf Ittenbach (les Premutos et consorts que l'on trouve sur le catalogue d'Uncut Movies, que je recommande chaudement au passage) et les films italiens lents et malsains de Lucio Fulci ou Dario Argento. Cela dit, il y a un néanmoins un point où ils se rejoignent : pour l'innovation au fil des albums, il va falloir repasser.

Vu qu'il s'agit du premier pressage en format CD du groupe, il serait pertinent de s'arrêter un peu sur la genèse du groupe : Deux fans de death metal et de grind, Will Rahmer et Matt Sicher, décident de fonder leur propre groupe pour montrer au reste du monde que eux, ils aiment le vrai metal gouleyant qui pue le cadavre, en gros un metal aussi primaire que direct. Décembre 1989, le groupe, après avoir porté pendant quelques mois le patronyme de Grindcore Casket, est rebaptisé Mortician en hommage au film « Phantasm » sort sa première démo, enregistrée lors de répétitions, pour démarcher les labels. Mais c'est en 1990, avec l'aide du guitariste John MacEntee d'Incantation que le groupe va commencer à vraiment décoller. 600 exemplaires de leur secondes demo va faire le tour de la planète metal, et leur premier EP, « Brutally Mutilated » (John laisse alors la place à Roger Beaujard) commence à faire du bruit. Will Rahmer, avait d'ailleurs fondé en 1987 la New-York Death Militia, un club qui aidait au développement de la scène death de la Grande Pomme.

Cette compilation, qui est perçue par certains comme le premier album du groupe, est intéressante, et ce sur plusieurs points ; Nous avons un aperçu clair des premiers temps du groupe, au moment où il commençait à trouver son chemin, où il se sortait des galères inhérentes à tout jeune groupe de metal extrême et au moment où il se constituait son identité. De plus, le batteur qui officiait, Matt Sicher, est viré du groupe suite à son addiction pour les drogues dures et mourra d'une overdose en 1992. C'est le seul enregistrement longue durée de Mortician avec une vraie batterie du début à la fin, le groupe étant devenu largement plus célèbre pour son utilisation massive et complètement mongoloïde de la boite à rythmes par la suite. A juste titre, "Mortal Massacre" n'apparait pas comme un album, ni même une réelle compilation de leur carrière, mais bien comme un document de cette époque charnière.

L'enregistrement débute donc par le premier EP du groupe, à qui la compilation doit son nom : « Mortal Massacre », qui avant d'en être une, était justement un mini de 5 titres. Très justement placé en tête de la tracklist, le groupe dévoile enfin, après 2 années d'efforts à répéter, son potentiel ; Une introduction de presque trois minutes (tirée de « La nuit des morts vivants » de Georges Romero), du sampling en veux-tu, en voilà, presque à chaque titre, une méthode influencée par le groupe Impetigo, qui deviendra la marque de fabrique du groupe. Déjà, on peut voir à quel point le son est un élément important de la musique de Mortician : bas, très bas, grave et aussi graisseux qu'une marmite de gigot à la mayonnaise périmée... On peut sans peine imaginer Roger Beaujard manier une guitare dont les cordes seraient des câbles électriques. On peut aussi noter cette batterie, bien qu'humaine, placée en retrait lors du mixage, son rôle étant plus celui d'un apport aux cordes emportées par ce groove cadavérique et ce son complètement cryptique, plus qu'un véritable instrument de musique. Elle va d'ailleurs à toute allure, sans se soucier des victimes au passage, notamment sur le titre phare « Mortician ». Cette production donne l'impression, par rapport aux enregistrements antérieurs de Mortician, d'être plus synthétique, plus sous l'emprise des distorsions et réverbérations d'un mixage que l'on imagine sans mal sous le signes des produits illicites, caractéristique que l'on retrouve dans les albums et EP suivants. Et La voix de Rahmer... Argh ! Plus primaire qu'un attardé mental sous amphétamines et aussi grave que les cris d'un zombie que l'on passe à la broyeuse... Elle se marrie d'ailleurs très bien aux guitares et au feeling particulièrement malsain. Mortician est vraiment né, de l'horreur, des morts-vivants, de l'hyper-violence, un groove frénétique et du blast. Déjà bien bon, même si on atteint pas encore le stade ultime de « Zombie Apocalypse » ou « Chainsaw Dismemberment ». Trop court, on sent que la maîtrise n'est pas encore là, mais reste un moment bien sympathique. Fin de l'acte premier, j'ouvre une bière.

La deuxième partie, c'est la demo « Brutally Mutilated », véritable premier enregistrement de Mortician ; Dans les structures, le style à mi-chemin entre le death metal cadavérique et le grindgore jusqu'au-boutiste, très similaire à « Mortal Massacre ». Des titres courts, de quarante secondes (qui concilie Napalm Death, Carcass et les zombies) jusqu'à trois minutes, avec des breaks en mid-tempo salvateurs de boucherie, qui font la part belle aux guitares, déjà bien atteintes du gras caractéristique du trio, laissant apprécier sa profondeur auditive. Pourtant, c'est déjà un style assez différent : la batterie reste parfaitement audible, avec un son mat, son mixage ne la reléguant pas encore dans le champ extrémiste de la boite synthétique à concassage, euh, boite à rythme. Cela reste néanmoins très appréciable, Matt Sicher restant un batteur aussi virulent qu'un cannibale texan. On ne peut pas encore parler du groupe de death metal le plus extrême de la planète comme on allait le dire par la suite, surtout qu'il y avait bien pire à cette époque. Mais la volonté était déjà là, les ambiances mettent l'accent sur le côté horrifique et malsain des musiciens, même un son plus personnel et profond aurait été largement plus adéquat. Qu'importe, les minutes restent précieuses, et si elles avaient été légion, peu de risque que l'attention de l'auditeur eut été violé par l'univers de nos new-yorkais préférés. Fin du second acte, j'ouvre une deuxième bière.

Enfin, on en vient à la dernière partie, et là, c'est le pack qu'il vous faut. Pas moins de deux sessions live vous sont offertes, avec deux batteurs différents, dont Matt Sicher pour le live de 1990 à Buffalo, et un autre pour celui de Détroit en 1992, soit George Torres (qui officia pour Skinless), soit Kyle Powell d'Engorge. Mais à vrai dire, on s'en fout royalement, pour la bonne raison que pas grand chose, pour ne pas dire rien, ne distingue les deux enregistrements. On a donc une version live des morceaux de la demo et du EP qui reviennent pour certains deux fois. Une version très raw de la demo « Mortal Massacre » avec un rendu qui ne révèle pas très bien la présence scénique du groupe. Ok, on distingue bien ce qu'il se passe, ce qu'il se joue. Ok, ça peut avoir un charme, les guitares ont l'avantage d'être bien sales, la voix grave, la batterie bien centrée... Mais le son souffre de l'inconvénient très handicapant de donner l'impression de distance, comme si un fossé se trouvait entre le micro et le groupe. Peu intéressant au final, dommage car Mortician n'est pas le groupe type qui passe sa vie sur les tournées, c'est le moins que l'on puisse dire...

Il est franchement agréable ce disque de Mortician, pourtant, je me surprend moi-même à lui coller une note entre deux eaux, et cela tient dans mon appréciation personnelle : Car le Mortician que j'aime, il est jusqu'au-boutiste, mongol et extrême, bourré de samples qui satisfait chaque horror geek. Le peu d'unité, au niveau de la production surtout, et le décalage chronologique entre chaque enregistrement ne permet pas de prendre véritablement pied dans leur univers. Chaque partie reste trop courte mais prenante, ou bien trop longue et peu intéressante, et donne l'impression d'une œuvre non aboutie. En définitive, un glaviot de sang depuis longtemps séché à réserver aux fans die hard, un document historique de la New York Death Militia et l'occasion d'écouter son groupe (préféré ?) en live, avant que ne sorte « Zombie Massacre Live »

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